I can't get no satisfaction !
Parfois, rien n’y fait. On a beau se donner du mal, mettre une triple couche de pommade et une double dose de sourire, rien ne change. Cela n’est jamais assez bien : ni l’heure de passage, ni la façon de faire le soin, ni l’infirmière. Rien ! Laissez-moi donc vous parler des éternels insatisfaits.
Me voilà en route pour une série de pansements. Je connais le monsieur et sa famille pour les avoir vus plusieurs fois auparavant.
Quel plaisir d’arriver au bout de ce chemin, de se garer, d’enjamber une mare de bouillasse pour entendre le fils de la maison me lancer : « faut bouger la voiture, j’voudrais partir ! »
Ok, bonne ambiance, ça commence bien. J’aime ces entrées en matière où l’on sent tout de suite un accueil des plus chaleureux ! Je déplace donc mon véhicule en ronchonnant quelque peu puis entre dans la maison.
- « J’avais peur que vous ayez oublié parce que l’autre fois, vous n’êtes pas venue pour mon vaccin de grippe. »
Mais si, je suis venue, le lendemain, certes, mais venue quand même. La tournée était chargée et, bon, j’avoue, je n’avais pas relu ma liste. Fait exprès, ce n’est jamais les personnes les plus agréables que l’on zappe. Non, toujours les casse-noisettes, qui nous font bien comprendre que non, l’erreur n’est pas humaine et que l’on n’avait ABSOLUMENT pas le droit de les oublier. Zut, zut, ils me reparlent du vaccin. L’air de rien, je leur rappelle que la piqûre a été faite le lendemain et qu’il y a eu no problemo. Bon, allez, trêve de plaisanterie : à l’attaque du pansement !
- « Vous allez venir toujours à c’t’heure-là ? Demain, on aimerait bien aller au marché et ça va être tard. »
Hou là, je sens que ça ne va pas le faire. Je leur explique que l’on verra pour l’horaire après et que, là, j’aimerais commencer ! Je m’attelle à ma tâche en prenant soin de bien m’appliquer, légèrement perturbée tout de même par l’interrogatoire de Monsieur, véritable inspecteur Columbo, l’imperméable beige en moins:
- « Vous mettez quoi ? Vous allez faire un gros pansement ? Là-bas, à l’hôpital, ils mettaient pas ce collant-là, parce que celui-là, il tient pas. »
Ok, d’accord, je ne savais pas que j’avais affaire à un expert. Ma patience a des limites, mais je prends sur moi. Je serre les dents, finis le soin et casos, tchao, bye bye, à demain !!!!
Le lendemain, j’ai l’impression de vivre la même journée que la veille avec un « on pensait que vous nous aviez oubliés », « le pansement, il a gêné mon mari pour dormir, il faudrait le faire plus petit ». Mais crotte de bique, à la fin. Ras-le-bol, je leur fais comprendre que c’est à nous, les infirmières, de gérer les soins, que c’est notre métier, que l’on sait ce que l’on fait et qu'il faut nous faire confiance.
Malgré la meilleure volonté du monde, rien n’y fera. Tout le long de la série de soins, Monsieur et Madame ne seront jamais contents. Pas désagréables mais définitivement, éternellement insatisfaits. Il y aura toujours une critique sur l’horaire, la grandeur ou l’épaisseur du pansement, la façon de mettre le collant... Il ne faut pas attendre grand chose de ce genre de personne car rien ne sera jamais assez bien pour eux. Il faut faire son job, et laisser couler.
Comme dit un vieux proverbe : « Pour chier à son goût, il faudrait mettre de la merde de partout ! »
Alors, on passe à la suite et on arrête de se prendre la tête !