Dans le prisme du journal....
-« À la télé, ils ont parlé de vous ! »
Sa voix a résonné, perçant le silence qui régnait dans la pièce alors que je terminais la prise de sang.
-« Ah bon, et qu’est-ce qu’ils ont dit ? »
-« Ils ont parlé des fraudes. Il y en aurait qui frauderait et ça ferait le trou de la Sécu. »
J’étais en train d’écrire le nom de ma patiente sur les tubes et j’ai failli m’étrangler. J’ai regardé la dame et lui ai demandé calmement si elle pensait que c’était la vérité.
-« Ben, j’en sais rien moi. S’ils le disent au journal télé, ça doit être vrai… »
J’ai soufflé un bon coup, et j’ai tenté d’expliquer à ma patiente que ce n’était pas la majorité. Que les cas de fraude comme elle dit ne sont pour la plupart pas fait intentionnellement. Je lui ai parlé pour nous les infirmiers de la pose de bas à varices ou les gouttes ophtalmiques qui n’entrent pas dans nos cotations mais qui sont parfois demandées. Je ne voulais pas la convaincre à tout prix mais lui expliquer. Seulement voilà, face au journal de 20 heures, je n’avais pas beaucoup de poids.
Je ne la ferai sans doute pas changer d’opinion. Elle écoutera certainement plus un homme assis à un beau bureau à l'intérieur son petit écran que son infirmière. Pourtant, elle sait que les professionnels de santé qu’elle côtoie se démènent pour assurer la continuité des soins. Elle se rend compte que le jour où elle devra se rendre à l’hôpital, elle sera bien contente d’appeler l’ambulancier. Que lorsqu’elle sera mal, elle consultera son médecin traitant et que son infirmière se déplacera pour lui prodiguer les soins dont elle a besoin. Ce n’est pas le présentateur du journal télé qui viendra. Non, c’est nous. Du moins, tant que nous le pouvons encore…