Ce joli p'tit chien....
Le soleil était déjà haut dans le ciel quand je pris la petite route qui mène au fin fond du fond du trou du cul du monde. Une bonne dizaine de kilomètres sur une route, que dis-je une « routelette » où croiser une voiture procure autant d’adrénaline qu’un tour de grand huit à la fête foraine (je ferme les yeux, sers les fesses ! Ouf, ça passe ! Petit regard à droite puis à gauche, c’est bon, les rétros ont survécu !). Aucune habitation, à l’exception d’une vieille grange abandonnée, puis, au détour d’un virage : la civilisation. Enfin, ce n’était pas non plus la cohue du samedi après-midi au centre commercial, juste deux-trois maisons qui se couraient après. Je garais mon bolide devant la première et entrais dans la cour. Un chien, aussi large que haut m’accueillit en sautillant.
-« Salut Fifi, ouiii t’es un bon toutou ! »
Le maître alerté par les jappements joyeux de la bête, passa la tête dans l’encadrement de la porte.
-« Alors ma fifille, tu as dit bonjour à l’infirmière. Allez, viens ma jolie, laisse la dame tranquille. »
Pendant le pansement, Fifi restait sagement aux pieds de son maître. Elle nous observait. Ce petit bout de chien, qui au premier abord ne semblait pas destiné aux prix de beauté (un chien dont le physique tirait plus vers la saucisse que la race canine !) ne loupait pas une miette de la conversation. Nous discutions tous les trois (le monsieur et moi, le monsieur et Fifi, Fifi et moi, hum, bizarre !). Au départ, j’étais un peu déstabilisée par ce petit chien aussi pot de colle qu’une « superglue » puis, au fil des jours, je me suis habituée. Fifi, était là, elle faisait partie de cette maison et formait avec son maître un duo aussi farfelu qu’attachant. Le monsieur avait perdu sa femme deux ans auparavant et Fifi était devenue « la part de l’autre ». Elle lui rappelait les douces années avec son épouse et le manque de l’une avait fait de l’autre un pilier. Un pilier qui ne faisait pas flancher le maître. Ce petit bout de chien était ce pour quoi le monsieur se levait le matin. Il partait le promener, lui donner à manger, le brosser, lui parler. Il maintenait grâce à ce petit toutou, la tête hors de l’eau parce qu’il y avait la vieillesse, la solitude et tout le reste qui l’entrainaient vers le fond. Fifi était sa bouée de sauvetage. En partant, je fis une caresse sur son museau (de Fifi, pas du maître !) un peu pour la remercier de s’occuper aussi bien du monsieur. En fermant la porte, mon cœur semblait plus léger et je me promis qu’en rentrant chez moi, je ferai un peu plus de caresses à ma bête à moi. Je prendrai le temps de jouer avec elle quand en rentrant elle posera son énorme patte sur mon genou en me lançant un regard éploré (« s’il te plaît, s’il te plaît, lances moi la baballe au moins une fois »). Parce qu’un animal peut faire beaucoup plus que garder la maison, il peut être le dernier compagnon d’une vie. Et cela, vaut bien un minimum de reconnaissance….