Je ne viendrai plus...

Publié le par La petite infirmière

Je ne viendrai plus...

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. Vous recevrez cette lettre si difficile à écrire.

On ne peut pas continuer ainsi, pour vous comme pour moi, la relation n’est plus possible.

 

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. J’ai passé des nuits sans dormir. J’ai senti la peur me tordre le ventre. Je n’ai rien pu avaler à cause de cette boule au fond de la gorge.

 

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. La violence a pris le pas sur le reste et je veux rester digne. Les mots ne sont plus acceptables, les coups pourraient venir bientôt. Cela est déjà arrivé, certains ne s’en sont pas sortis. C’est pour me protéger que je ne viendrai plus.

 

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. J’ai essayé pourtant mais lorsqu’en face se dresse un mur, rien ne sert de s’acharner. Même si la culpabilité et l’impression de ne pas être à la hauteur viendront entacher ma décision, je ne viendrai plus. C’est décidé car aujourd’hui, je refuse de continuer ainsi.

 

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. Le désir de bien faire mon travail, ne doit pas me mettre en danger. La violence dans les soins n’est pas acceptable. Nous sommes là pour prendre soin de vous, pas pour prendre des coups dans la tronche. Nous sommes là pour prendre soin de vous, pas pour être accueillis avec des injures. Nous sommes là pour prendre soin de vous, pas pour être rabaissés, traînés plus bas que terre sous prétexte que vous êtes chez vous et que vous avez tous les droits.

 

Je ne viendrai plus, cette fois c’est terminé. Vous recevrez cette lettre recommandée si difficile à écrire, expliquant les raisons de l’interruption des soins. Nous sommes là pour soigner, nous ne sommes pas là pour risquer notre vie.

 

Plusieurs de nos collègues subissent chaque jour des violences verbales ou physiques, à domicile mais également en structure de soins. Lorsque nous franchissons les portes des maisons, nous ne savons pas ce que nous allons trouver derrière. Nous y allons sans paranoïa (parce que ce ne serait pas vivable) mais en gardant dans un petit coin de la tête une alarme face au danger. Lorsqu’une situation dégénère, lorsque le soin n’est plus possible, la décision d’interrompre la prise en charge peut s’avérer nécessaire. Difficile mais parfois nécessaire car la violence ne doit pas s’introduire dans la relation de soin. "Je ne viendrai plus, cette fois c'est terminé" : pour se rappeler que nous sommes là pour aider et non pour subir.

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A
De plus en plus de violences dans le secteur médical, je me souviens de mes stages à l’hôpital, où il m'était interdit de franchir la porte d'une chambre, le patient jetait tout les objets au visage des soignants...
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