Dans la peau d'une vieille petite infirmière dans la prairie...

Publié le par La petite infirmière

Madame Doubtfire...

Madame Doubtfire...

Je suis allongée sur mon lit et je t'attends. J'attends ta venue comme l'on attend la visite d'un ami cher. Il n'y a que toi en cette période estivale. Tout le monde est parti. Les enfants ont pris quelques jours de vacances alors je ne les verrai pas avant un mois. Les voisins ont de la famille venue de lointaines contrées alors je n'ose pas les déranger.

J'ai presque toute ma tête. J'écris encore, je regarde mes séries préférées (on en est à la saison 45 de Walking Dead !), j'apprends même encore des gros mots à mes arrières-petits-enfants ! Côté ciboulot, pas trop de soucis mais c'est le corps qui ne suit plus. Les jambes, le dos et tout le reste. J'ai beau le vouloir de toutes mes forces, pas moyen de mettre un pied devant l'autre. Je suis là, à croupir sur mon lit. Les minutes sont des heures au son de la vieille pendule. Aucun bruit dans la maison à part cette satanée pendule ! Je t'attends et tu ne viens pas. Tu dois avoir beaucoup de travail ce matin. Je comprends, j'étais comme toi avant mais, malgré tout, je désespère d'attendre.

Tu vas arriver avec ton joli sourire. Tu m'accompagneras dans la salle de bain. Tu me laveras avec des gestes doux et moi, je me laisserai faire parce que seule, je n'y arrive plus. Tu me parleras et tes yeux rieurs se poseront dans les miens et je me sentirai exister quelques instants. Puis, après m'avoir ramenée à mon fauteuil, tu me quitteras et je resterai seule dans le silence de cette trop grande maison. Seule jusqu'au lendemain, jusqu'à ton retour.

Les jours passeront et je resterai là, à attendre. La vie, ma vie pourtant naguère si rythmée semble bloquée au ralenti. Il est où le temps où je passais mon temps à courir parce qu'il fallait enchaîner les heures sans sourciller ? Maintenant que je peux à peine marcher, les simples souvenirs de cette vie agitée sont comme des coups de poignards en plein cœur. Chaque pas me manque, chaque sonnette me manque, chaque visage me manque. Tout est passé si vite.

Demain, tu reviendras. Tu ne resteras que peu de temps car ta tournée est bien chargée en cet été. Tu m'accompagneras et je revivrai à travers toi le métier que j'ai aimé  : mon métier d'infirmière.

Notre métier survivra-t-il toutes ces années ? C'est la question que je me suis posée en écrivant cet article, en m'imaginant âgée, attendant mon infirmière. Oui, je ne me suis pas interrogée sur le "comment je serai" (on ne peut pas le savoir et c'est tant mieux) mais je me suis simplement demandée s'il y aura encore quelqu'un pour prendre soin de moi ! 

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